Jean était plus
rassuré, et maintenant il se réjouissait de voir que tout était bien
planifié et organisé. J'avais continuellement des personnes prêtes à
m'apporter leur support partout où j'allais, il était enfin sécurisé.
Quand je parlais de
mon futur voyage, des gens me voyaient si excitée qu'ils me disaient
que je serais peut être déçue. Ils pensaient que je n'étais pas très
réaliste de penser que tout se déroulerait comme je le souhaitais.
Ce voyage n'était
pas comme un autre. Je trouvais qu'il sortait du commun. Il était
uniquement basé sur la confiance réciproque avec des gens que j'avais
commencé à connaître de l'intérieur ; des gens à qui j'avais fait
beaucoup de confidences, qui m'en avaient fait et que je savais aussi
sincères que moi. Au fil de nos échanges, j'avais appris à croire en eux
et je me fiais à mon jugement qui habituellement était assez juste.
Pour Jean et tous ceux que je devais rencontrer, j'avais tout
mis par écrit et ils pouvaient toujours suivre mon itinéraire. C'était
rassurant.
La journée de mon
départ, le 6 juin, j'étais très fébrile. Je vivais comme dans un rêve et
j'avais un peu peur de me réveiller. J'y croirais lorsque je serais
dans l'avion.
Jean était venu me
conduire à l'aéroport de Mirabelle. Comme mon avion avait un peu de
retard, je lui conseillai de ne pas attendre inutilement. Il avait l'air
tellement malheureux, ça me faisait mal au cœur de le voir comme cela.
Tout avait été dit et je ne voyais pas l'utilité de rester tous les deux
à attendre. Je crois qu'il avait aussi hâte de retourner à la maison
car il y avait comme un malaise entre nous; nous n'avions plus rien à
nous dire. Je crois que j'étais trop absorbée par cette aventure pour
être vraiment présente à lui.
Je me préparais à
connaître d'autres cieux mais, avant tout, ce qu'il y avait de plus
important pour moi, c'était la rencontre des personnes avec qui j'avais
tissé des liens. Je me disais que c'était un beau cadeau que la vie me
faisait et j'étais bien décidée à en profiter au maximum.
Pendant tous ces
mois, la communication avec les jeunes avaient été régulière et je
sentais maintenant l'impatience des jeunes qui préparaient ma venue.
Denis m'avait dit que plusieurs prenaient même leurs périodes de
récréation pour fabriquer des petites surprises pour moi. Il n'arrivait
plus à les tenir contenir.
Enfin le départ !
Je m'étais
organisée pour dormir dans l'avion, bouchons, turban pour les yeux,
oreiller et couverture. Il était 22 heures et je devais arriver, six
heures plus tard (avec le décalage horaire, à 11 heures et demie, heure
de Paris).
Mais ce n'est pas
aussi facile de dormir comme on veut sur un vol de cette durée, il y a
les repas et toutes les interruptions qui s'imposent. Aussi, vers
minuit, après avoir pris un repas je comptais bien me reposer quelques
heures.
Il était près de deux heures quand j'ai ouvert les yeux. Lorsque je m'étais endormie, il faisait complètement nuit et déjà,
c'était l'aurore. Je me croyais à la fin de mon voyage, mais non… Je me
sentais par contre très bien éveillée. J'ai alors refermé les yeux et
j'ai commencé mentalement à faire connaissance avec plein de monde.
Sans juger
personne, quand on a une correspondance suivie avec quelqu'un, on se
fait une idée de sa personnalité sans connaître son physique. On
l'imagine d'une certaine façon, toujours sur l'impression que l'on a.
Par écrit c'est encore plus difficile car l'écriture est statique et ne
nous transmet pas toujours les émotions, jamais le timbre de voix et
rarement un ensemble complet de l'individu.
Comme je l'avais
fait à maintes reprises, je repassais donc dans ma tête, la liste des
correspondants que je rencontrerais et avec qui j'avais eu le loisir
d'échanger beaucoup. C'est pourquoi, je disais que je les avais connus
de l'intérieur.
Je visualisais
donc, en suivant mon itinéraire, Denis, Marie Françoise, Roger, Marie
Françoise de Jérusalem ainsi que Serge dont j'ignorais encore le moment
de la rencontre. Je pensais à tous mes petits amis du collège en me
demandant si le courant passerait autant que sur Internet. C'est
accompagnée de toutes ces personnes que je traversai l'océan pour me
retrouver à Paris sans m'en rendre vraiment compte.
J'étais certaine
que Denis serait là à ma rencontre. Il me l'avait promis! Il m'avait
offert de venir me chercher à Paris, même si j'avais dit que je pourrais
prendre le TGV. Il trouvait que ça serait plus facile pour moi et comme
il avait raison mais je ne voulais pas m'imposer.
Durant les 9 mois
de communication, il s'était peu livré et je ne savais pas grand` chose
de lui, sinon le principal que j'avais ressenti, c'est-à-dire qu'il
était un gentilhomme et que je pouvais me fier à lui.
Pour qu'il me
reconnaisse, je lui avais dit que je serais habillée d'un ensemble jaune
citron et que je me doutais qu'il n'y aurait pas beaucoup de serins de
mon genre qui débarqueraient à Charles de Gaule ce matin là.
Je n'avais pas
beaucoup de points de repère pour le reconnaître mais aussitôt que je le
vis parmi la foule, je sus que c'était lui, même s'il n'avait pas eu
une pancarte à mon nom, je l'aurais su immédiatement.
J'étais partie de Montréal à 26 degrés, je débarquais à 13
degrés avec des grands vents. Je n'étais pas vraiment habillée pour
affronter ce froid mais l'excitation aidant, j'ai passé au travers.
Tout le long du
trajet vers Roubaix, tout près de Lille, qui dura quelques heures, nous
avons bavardé comme deux grands amis qui se retrouvent après une très
longue séparation. Nous étions très à l'aise tous les deux. Il
souhaitait que tout soit parfait pour mon arrivée chez lui où j'étais
attendue. A trois ou quatre reprises, il appela chez lui pour dire où
nous étions rendus et s'informer si tout était en place.
Lorsqu'il m'avait
invitée, il m'avait dit que je serais reçue comme une reine et c'est ce
qui s'est produit. Rien n'avait été épargné. Son ami Pascal et sa
famille m'attendaient à son appartement. Les fleurs et le champagne
étaient là aussi pour me souhaiter la bienvenue.

Les enfants de Pascal et Lysiane….
Ludovic,Frédéric et Magali, m'offrent des fleurs pour ma chambre

Mon hôte Denis

Lysiane et
Pascal
Bien que fatiguée, je me sentais très bien. Pour moi, il était 6
heures du matin mais je fis quand même honneur à l'excellent repas
préparé par Pascal. Le climat était à la fête et ces premières heures
sur le sol de France me confirmaient que j'avais bien fait d'aller au
bout de mon rêve.
Il se dégageait
beaucoup de chaleur de ce petit groupe et je me sentais attendue et
acceptée. Fleurs, champagne, à 6 heures 30 du matin… wow… petits canapés,
rôti de bœuf avec accompagnement et gâteau St-Honoré.
Pascal dont j'avais
entendu parler quelques fois s'était surpassé, l'adrénaline avait fait
son œuvre et j'étais aux anges… Nous avons parlé durant des heures autour
de la table jusqu'à ce que je décide enfin d'aller prendre un peu de
repos.
Je me suis couchée
sur la fin de l'après-midi. Nous avons parlé pendant quelques heures
durant la soirée, paraît- il… mais je n'en ai aucun souvenir.

Ici, mon hôte Denis
avec son très beau chat Toupie dans son bureau. C'est de là que je
pouvais communiquer avec mon mari tous les jours.
En France ce n'est
pas le même système que nous avons pour facturer les communications sur
Internet, c'est assez dispendieux. Je ne sais pas au juste comment les
frais se calculent, mais aux heures de grande affluence c'est plus dispendieux.
Moi, qui étais
habituée à ne rien calculer chez moi, je devais faire attention et me
débrancher aussitôt les messages entrés ou partis. Bien entendu, Denis
ne m'avait pas limitée mais je ne voulais quand même pas lui monter un
compte trop salé.
J'habiterais donc,
pour la durée de mon séjour à Roubaix, dans le bel appartement de Denis,
au 2e étage. C'était très propre et assez vaste, avec de grandes
fenêtres dans chaque pièce favorisant ainsi l'entrée de la lumière. Tout
de suite je me suis sentie chez-moi. Dans un coin de la grande pièce de
séjour, il y avait un beau petit secrétaire qui semblait attendre que
je m'y installe pour lire ou pour écrire.
Mes hôtes
revenaient à la maison vers 13 heures, ce qui me donnait amplement le
temps de faire la grasse matinée et de me préparer pour une sortie. La
température était assez fraîche, ça ressemblait beaucoup plus à celle du
Québec au début de mai. J'avais beaucoup de vêtements mais pas pour une
température de 13, 14 ou 15 degrés. Heureusement que j'avais apporté
mon imperméable.
Pour cette première
journée de visite, nous sommes allés en Belgique, à Tournay. Nous avons
visité une très belle cathédrale à 7 clochers. C'était immense. Il y
avait des réparations à l'extérieur, l'architecture était de toute
beauté. Des tableaux de grands maîtres y sont exposés en permanence et
nous pouvions voir les ravages que les guerres avaient laissés sur ces
magnifiques oeuvres.
C'est très riche
comme enseignement de visiter d'autres pays et il y a une histoire à
chaque tournant. Moi je n'ai pas connu ces grandes guerres des siècles
derniers, heureusement… mais ça me laisse songeuse et me fait davantage
apprécier mon sort et mon pays.
Nous sommes revenus
à l 'appartement pour souper et nous avions notre cuisinier attitré en
la personne de Pascal. Il s'est dévoué comme si j'étais quelqu'un qui
lui était très cher, et pourtant nous ne nous connaissions que depuis
quelques heures.
Dans la soirée,
j'ai fait mon repassage, mes deux compagnons étaient là devant moi,
toujours prêts à m'aider et nous avons échangé de tout et de rien. Cette
soirée demeure pour moi, un très beau souvenir.
C'est assez tôt que
j'ai regagné ma chambre. Mardi était une très grosse journée, la
fameuse rencontre avec mon fan club. J'avais eu le temps de dormir
beaucoup et le décalage horaire ne me dérangeait pas trop. J'étais bien
contente, car les informations que j'avais eues sur la difficulté de
traverser cette étape m'avaient un petit peu inquiétée. Je voulais tant
profiter au maximum de mon voyage.