Je continue mon récit avec mes jeunes amis …
Vers la mi-mars, les élèves savaient que nous ferions un livre
qui serait mis en évidence au moment de souligner le dixième
anniversaire du collège Étienne Dolet, et ce, au cours du mois de juin..
On me disait souvent que ça
serait intéressant que je sois avec eux pour cette occasion, on
m'invitait à ménager mes sous pour ce voyage que je devrais
entreprendre. Graduellement, l'idée de me rendre à leur rencontre se
faisait dans mon esprit, tout doucement.
Il y avait des embûches de
taille à surmonter avant et je voulais tout planifier pour faire de ce
voyage une réussite. Je commençai par le plus difficile, c'est à dire,
convaincre mon mari de me laisser partir, de préférence toute seule.
J'ai une meilleure capacité
d'adaptation que lui, aussi bien aux gens qu'aux événements. Il y eu
beaucoup de discussions; au début, chaque fois que je voulais aborder le
sujet, tout de suite mon mari se fermait et ne voulait pas du tout en
discuter. Il devinait toujours ce dont je voulais l'entretenir et il en
retardait l'échéance.
Une journée que nous étions
dans un lieu public, j'abordai le sujet qui me tenait de plus en plus à
cœur. Je pus facilement et calmement répondre aux objections soulevées.
Je lui expliquai qu'en partant seule, ça serait plus facile de me loger si, comme je le prévoyais, j'allais dans une famille, pour eux aussi
ce serait beaucoup mieux. De plus je voulais être complètement libre de
mon temps et pouvoir me reposer aussi souvent que j'en aurais besoin.
Étant d'un caractère assez
inquiet, je savais aussi que s'il décidait de m'accompagner, il ne
serait pas aussitôt parti qu'il voudrait revenir et serait toujours
inquiet d'une tante âgée à laquelle il était très attaché et dont il
s'occupait pratiquement à plein temps ; sans compter que nous avions
aussi un petit chien qu'il ne voudrait pas laisser aussi longtemps.
Quand j'ai réussi à le
sécuriser en lui affirmant que tous mes déplacements seraient planifiés
et qu'il pourrait me joindre partout et en tout temps sur Internet, il
commença à fléchir, mais ça faisait déjà plusieurs jours que j'avançais
pas à pas.
Je le rassurai sur le fait que
ce n'était pas que je ne voulais pas l'avoir à mes côtés, mais que ça
serait beaucoup plus facile pour moi de ne pas avoir à me préoccuper de
son bien-être tout le temps.
Je lui demandais de me faire
confiance et de me donner cette grande preuve d'amour qui ne pourrait
qu'être bénéfique pour nous deux. Il accepta finalement, mais en pensant
que je partais juste une semaine.
Ce grand pas franchi, j'envoyai un très court message à Denis qui se lisait comme suit ;
'' Et si j'y allais ''
La réponse ne se fit pas attendre….
Chère Wilda... C'est plus qu'envisageable... C'est souhaitable.. Nécessaire. Évident.. Je t'attends, on t'attend..
En plus, ce sera la fête des dix ans du collège, je n'osais pas te le demander, je croyais ce rêve inaccessible.
C'est fantastique, je suis tellement content, ça me réconcilie avec la vie.
Si tu savais la joie que ressentiront les élèves en apprenant
cette nouvelle. Là j'ai quelqu'un avec qui je dois travailler mais je
t'en parlerai plus longuement, tu vas voir, tu vas être reçue comme une
reine.
Super… A bientôt Denis.
Voilà de quelle façon se précisait un rêve que jusqu'alors,
j'avais cru inaccessible. Nous étions rendus à la fin de mars et il
fallait planifier, organiser, me renseigner et voir mon médecin pour
voir si c'était envisageable de partir ainsi à l'aventure.
Je demandai alors à Denis de ne
rien révéler aux élèves encore car lorsque j'avais envoyé cette
bouteille à la mer, je ne savais pas quelle serait sa réaction et à ce
moment-là tout était hypothétique, naturellement j'étais enchantée de
son invitation car je ne me voyais pas à l'hôtel, toute seule, pour
plusieurs jours.
La semaine
suivante, les élèves le savaient et me proposaient toutes sortes
de sorties. Je vivais comme dans un état second. Je n'étais
jamais allée en Europe et c'était ma
première expérience d'un voyage de cette nature.
Je voulais mettre toutes les chances de mon coté afin de profiter au maximum de mon dépaysement.
J'étais rassurée sur le fait
que j'aurais une chambre pour moi toute seule et que je pourrais me
reposer autant que j'en aurais besoin, c'était primordial pour moi. Si
j'avais tout le repos que nécessitait ma condition, je pourrais passer
au travers.
Je commençai graduellement à en
parler à mes autres correspondants et correspondantes lointains, j'en
avais huit avec qui j'avais de très bons rapports et avec qui je
communiquais depuis déjà quelques mois.
Six m'ont encouragée à tenter
l'expérience et m'ont invitée ; les deux autres ont cessé toute
communication. Elles avaient probablement peur de me voir rebondir chez
elles avec mes bagages ; pourtant ce n'était pas du tout mon intention.
Je crois que c'est quand nous mettons les gens à contribution que nous
reconnaissons nos vrais amis.
Parmi mes six correspondants,
il y avait quatre femmes et deux hommes, nous avions déjà établi de bons
rapports et la communication était assez régulière.
La première, MF demeurait à Nantes et tout de suite, elle
m'invita à aller la visiter; une autre, Miche, m'assura qu'elle serait
heureuse de me rencontrer, si c'était possible. Une autre bonne amie
demeurait à Jérusalem mais était française et devait venir passer ses
vacances en France et exprimait son désir de faire ma connaissance, elle
me demandait mon emploi du temps.
Josette, me demandait mon itinéraire afin de voir s'il y avait des possibilités de rencontre.
Mon ami correspondant de la Suisse, m'invitait aussi, enfin mon
bon ami Roger, parisien qui venait de déménager près de la mer, était
bien déçu de voir que nous n'aurions pas la possibilité de nous
rencontrer.
J'étais subjuguée de tant de
chaleur, je vivais sur un nuage. À chaque jour, il y avait du nouveau et
l'itinéraire commençait à se préciser.
Bien entendu, je fis beaucoup
de recherches sur Internet, j'étudiais les cartes afin de visualiser les
distances qui me séparaient de ce beau monde et étudier les
possibilités qui s'offraient à moi d'aller à la rencontre de mes amis
virtuels.
Mon mari était sous
l'impression que je partais pour une semaine ; à force de discussions, il
fut convenu que si ça dépassait 18 jours, mes valises seraient à la
porte et qu'il n'était pas nécessaire que je revienne... hi hi....
Bien entendu, je comprenais que
pour lui c'était très difficile de me voir partir ainsi ; ça faisait 44
ans que nous étions mariés et il acceptait très mal de nous voir
séparés aussi longtemps. Il a toujours voulu me protéger de tous les
dangers et là il me voyait privé de sa protection et il était inquiet.
Je pensais partir pour trois
semaines, cela m'aurait donné assez de temps pour rencontrer mes amis,
mais je crois que 18 jours étaient très raisonnables. Je planifiai donc
de me rendre à Lille et à Nantes, pour terminer à Paris.
Je lui conseillai donc de se
trouver un projet à faire pendant mon absence. Il y avait plusieurs
possibilités, car nous habitons une maison ancienne qui nécessite
toujours quelques améliorations.
Il me mentionna qu'il aurait
aimé enlever la parqueterie dans la cuisine pour la remplacer par de la
tuile. Nous sommes allés ensemble choisir une tuile qui s'harmoniserait
bien avec les couleurs existantes dans la pièce.
Jean a des mains de créateur, il peut faire n'importe quoi ; il
est très ingénieux mais il ne s'occupe pas beaucoup de la décoration et
de l'harmonie des couleurs, ainsi, s'il décidait de faire ce travail,
j'étais certaine que ça serait à mon goût. Il était cependant très libre
d'effectuer ou non ce travail.
Nous étions rendus au mois de
mai. Le temps passait très vite et en même temps très lentement. Je
racontais mon histoire à tout le monde.
J'étais comme un enfant qui découvre la cachette du Père Noël.
Une journée, où nous étions aux
Galeries d'Anjou, Jean discutait pendant mon absence avec un professeur
à la retraite. La communication sur Internet est devenue le sujet de
conversation.
Jean avait commencé à parler de mon projet de voyage. Je suis
arrivée sur les entrefaites et comme j'étais très volubile, l'épouse du
professeur est arrivée, se mêlant ainsi que plusieurs personnes qui
s'étaient arrêtées et prenaient par à la conversation.
Nous formions bientôt un cercle d'une dizaine de personnes de
plus de 50 ans. Je dois dire que c'est plutôt moi qui alimentais la
conversation pendant un peu plus d'une heure et les questions fusaient
de toutes parts : Comment cela avait-il commencé ?
Est-ce que ça faisait longtemps que je travaillais avec
l'ordinateur ? Que me disaient les jeunes élèves ? Etc, etc.
Ces gens, que je ne connaissais pas du tout, étaient très
intéressés par mon récit et trouvaient mon histoire très stimulante. Ils
ne connaissaient pas très bien les possibilités que pouvait offrir le
branchement à Internet et ils trouvaient mon aventure formidable .
………………..
De l'autre coté de
l'Atlantique, les élèves continuaient à communiquer régulièrement et me
disaient comment ils travaillaient à préparer ma venue.
Avec Denis, le dialogue se
poursuivait plus difficilement, à cause de son emploi du temps. Il était
si occupé que nous avions de la difficulté à nous rejoindre pour
planifier quoi que ce soit.
Je commençais à être un peu inquiète car je voyais combien son horaire était chargé et son temps libre presque inexistant.
Il me rassura en me disant qu'il s'était gardé du temps pour me
recevoir chez lui. Mettant de côté toutes mes inquiétudes, je décidai de
lui faire confiance à 100 %.
Marie-Françoise de Nantes,
m'envoyait des messages de bienvenue et me donnait toutes les
informations concernant les moyens de transport que j'avais à ma
disposition pour me rendre chez elle.
Le TGV qui partait de Lille
pour se rendre directement à Nantes, je croyais y aller une ou deux
journées mais elle me dit qu'elle me voulait pour au moins quatre jours,
il en fut donc convenu ainsi.
Denis me donna les coordonnées
d'un ami québécois qui lui aussi, devait se rendre, en juin, à Roubaix.
Il pensait que ça pourrait me faire un compagnon de voyage au cas où nos
départs seraient les mêmes. Cela pourrait ainsi sécuriser Jean qui
s'inquiétait toujours de me voir partir seule.
Par la suite, nous avons donc
commencé une correspondance, Serge et moi, et nous sommes devenus, au
fil de nos échanges, de bons amis. Par contre, nous n'avons pas pris le
même avion car lui arrivait à Bruxelles et moi, je tenais beaucoup à
visiter Paris.
Un soir,
alors que je communiquais
avec MF de Jérusalem, je lui fis part de la relation privilégiée que
j'avais avec les Marie Françoise car j'avais aussi pour grande amie, ici
au Québec, qui s'appelait Françoise.
Elle me répondit aussitôt en me
demandant si le nom de famille de l'autre MF ne serait pas par hasard
XXX. Je lui répondis par l'affirmative, c'était vraiment une coïncidence
extraordinaire !
Par un heureux hasard, moi, du
Québec, je communiquais avec les deux! Nous étions toutes les trois
ravies de cet état de chose et après quelques précisions, nous
réussissions à établir notre emploi du temps afin de nous rencontrer
durant les quelques jours que je passerais à Nantes.
MF de Jérusalem qui serait en
vacances à une centaine de kilomètres de là, au mois de juin, devait
communiquer avec l'autre MF pour fixer un rendez-vous.
Pour Miche et Jo, c'était
impossible que je les rencontre car la distance était trop grande, mais
je promis de les appeler. Pour mes deux correspondants masculins c'était
la même chose.
Roger, surtout, était très déçu qu'on n'ait pas la possibilité de faire plus ample connaissance.
Avec lui, j'avais une relation privilégiée. Tout de suite, nous
avions été sur la même longueur d'onde et nous avions beaucoup de
plaisir à chacune de nos rencontres sur Internet. C'est un pince sans
rire qui a un sens de l'humour assez marqué et nous nous répondions du
tac au tac sur ICQ.
Dans une communication écrite,
il est très difficile de faire des farces afin qu'elles soient prises
comme telles. Nous n'avons pas le ton ni les expressions du visage de
notre interlocuteur pour nous faire une idée juste de ce qui est dit,
c'est statique, il faut parfois faire quelques mimiques (( :- ))) pour
appuyer le sens qu'on veut bien donner à la phrase ou à l'exposé.
A chaque fois que je parlais
avec Roger de mon futur voyage, je lui mentionnais toujours Lille comme
lieu principal de ma destination. Il me disait être très déçu de ne pas
pouvoir me recevoir durant mon séjour à Paris.
Je partais le 6 juin et déjà
nous étions à la fin de mai . Il me restais à planifier ces derniers
jours. Au début, je croyais que Denis pourrait venir passer ces derniers
jours en même temps que moi à Paris, nous aurions pu visiter.
Impossible, il était de garde pour surveiller les examens et ne pouvait
vraiment pas se faire remplacer.
Je comprenais parfaitement et
je me préparais donc mentalement à passer ces trois jours, seule, à
Paris. Je savais bien que je ne pourrais pas visiter comme je le
voudrais et que je serais probablement plus souvent dans une chambre
d'hôtel, mais je ne m'en faisais pas outre mesure. Je faisais aussi
confiance à ma bonne étoile.
Quand Roger apprit cela, il me
proposa donc de demander à sa sœur qui habite Paris de m'accueillir et
me faire visiter la ville naturellement, j'étais ravie.
Il s'empressa de communiquer
avec sa sœur. Bien déçu, il m'informa que malheureusement elle partait
en vacances justement durant cette semaine là.
Il s'en voulait d'avoir suscité chez moi quelques espérances.
Je le rassurai et lui dis que je comprenais parfaitement la situation.
Je gardais confiance que tout
s'arrangerait puisqu'il avait pris l'engagement de régler tous mes
problèmes en tant qu'ange gardien attitré. Quelques jours avant, il
m'avait envoyé une carte de souhaits en me disant qu'il serait mon ange
gardien et qu'il s'engagerait à veiller sur moi (;-) alors avec une
telle déclaration, pourquoi m'en faire...
A quelques jours de mon départ,
j'étais occupée à écrire une lettre à MF quand Roger me demande un chat
sur ICQ. . Je lui répondis aussitôt que je pus , l'avertissant que je
serais disponible dans quelques instants, juste le temps de finir et
d'envoyer le message à l'amie qui m'hébergerait à Nantes…
Hein !! Quoi !! Tu viens à
Nantes durant ton voyage ? Mais c'est tout près de chez moi !! Nous
étions très excités tous les deux car de nouvelles perspectives
s'ouvraient devant nous et nous offraient la possibilité de nous connaître. Roger me demanda les coordonnés de mon hôte afin qu'ils
trouvent tous les deux un endroit de rencontre durant ces quatre jours.
Il me dit aussi qu'il tiendrait ses promesses de me trouver un
guide pour Paris. J'étais comblée, je pouvais partir tranquille.
De leur coté, les deux M F,
avaient fait un arrangement pour la rencontre qui devrait avoir lieu le
mercredi qui coïncidait avec la vacance de MF de Jérusalem
Roger me contacta avant mon
départ pour me dire qu'il m'avait enfin trouvé un guide qualifié pour me
faire visiter Paris, guide qui m'offrait même le gîte.
Je refusai gentiment le gîte,
j'avais déjà réservé une belle chambre d'hôtel au centre de Paris et là
je me sentirais plus à mon aise de cette façon, mais j'acceptai le guide
avec reconnaissance.
Et c'est ainsi que toutes les pièces du puzzle se plaçaient d'elles même pour ma plus grande satisfaction.